Manifeste affirmant le caractère un et divers de la langue d'Oc

Joan-Loís Escafit

/ #64 de la nécessité d'une modification constitutionnelle pour passer de la tolérance aux droits

2012-09-01 03:30

En prolongement de ce manifeste-pétition que je signe volontiers face au risque d'une dislocation mortelle d'une langue unique riche de la diversité de ces parlers en langues régionales ou locales cantonnées à des sous-parties de son aire linguistique, j'attire l'attention sur la nécessité d'une modification de la constitution en vigueur de la Vème République (au moins art. 2, 1er alinéa, et art. 75) afin d'ouvrir la voie à la co-officialité, au moins sur leurs aires historiques, des langues vivantes de la République française autres que le français.

En effet la jurisprudence ultime du conseil constitutionnel, rappelé explicitement par lui-même en mai 2011, détermine que, non seulement à travers un éventuel recours du 80 Parlementaires mais aussi par le biais d'une question préjudicielle de constitutionnalité soulevée dans un contentieux pour contester un droit ou une obligation considérée sans fondement constitutionnel, toute loi qui ouvrirait de vrais droits à connaître, apprendre, utiliser publiquement une de ces langues pour tous les habitants de son aire linguistique serait annulée pour inconstitutionnalité dans l'état actuel de la constitution. C'est essentiellement l'art. 2 qui bloque la ratification de la charte européenne des langues régionales ou minorisées issue du Conseil de l'Europe; cette charte était portant signée (avec des engagements minimaux) sur la base d'un mandatement (au ministre des affaires européennes qui était alors Pierre Moscovici) par lequel le Président de la République, Jacques Chirac, s'engageait personnellement à tout faire pour obtenir sa ratification; la consultation du conseil constitutionnel à laquelle ce dernier a ensuite procédé pour tout bloquer mérite le qualificatif juridique de forfaiture. S'en tenir à l'appellation de "langue régionale", surtout avec un art. 75-1 dans le Titre XII consacré aux collectivités territoriales qui ouvre la porte à la fixation par un conseil régional de la langue qui concernerait son territoire. Par ailleurs il faut souligner qu'une langue n'appartient pas au patrimoine d'un Etat mais à celui, immatériel, de l'humanité à charge du ou des Etats de son aire linguistique d'assurer sa sauvegarde et sa promotion car il ne l'a en quelque sorte qu'en dépôt si l'on admet que le fondement de la légitimité démocratique n'est pas dans la pseudo souveraineté nationale, cette dernière étant battue en brèche par les multinationales et les quelques grandes puissances militaires (au premier rang desquelles les USA); mais dans le principe de souveraineté populaire qui appelle une construction fédérale articulant autonomie et solidarité pour mettre en oeuvre à tous les niveaux de gouvernance les droits individuels et collectifs fondamentaux de tous les êtres humains (incluant la glossodiversité, concept proposé par Gardarem la Tèrra pour exprimer en parallèle à la biodiversité le nécessaire respect réciproque de la diversité des langues et des cultures qu'elles véhiculent, non limitées à une culture par langue): c'est dans ce sens que le manifeste fondateur de Gardarem la Tèrra proclamé sur le Larzac le 9 août 2003 à l'initiative de Robert Lafont conclut sur le premier principe (Le Peuple de la Terre a droit à la vie, quel que soit son lieu d’habitat et son degré de développement matériel et social): "l’objectif politique du " Peuple de la Terre " ne peut être que la gouvernance universelle (un système fédéral démocratique mondial) à substituer aux États et au désordre de l’impérialisme capitaliste" (cette formulation montre d'ailleurs que Robert Lafont accentuait son approche fédéraliste de la multidimensionnalité imbriquée des espaces constitutifs notamment d'aires linguistiques).