PÉTITION BERGER BLANC


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/ #5760 la loi

2012-05-19 16:41

Depuis le début de l’année universitaire 2011- 2012, des étudiants "salafistes", renforcés par des activistes et des miliciens et soutenus par des partis islamistes organisés ont attaqué plusieurs institutions universitaires, soit pour essayer d’y imposer le niqab dans les cours et les salles d’examen, soit pour marquer leur désapprobation au sujet de la tenue jugée irrespectueuse d’une enseignante ou pour contester les programmes établis par les départements ou les conseils scientifiques. Des incidents ont eu lieu à la Faculté des Lettres et des Sciences humaines de Sousse, à l’École Supérieure de Commerce de la Manouba, à l’Institut Supérieur des Arts et Métiers de Kairouan, à l’Institut supérieur de Théologie de Tunis, à l’Institut Supérieur des Langues de Tunis et dans d’autres établissements.

Mais c’est la Faculté des Lettres, des Arts et des Humanités de la Manouba qui a constitué, depuis le 28 novembre 2011, la cible privilégiée de ce groupuscule. Ces activistes y bafouent le règlement intérieur en vigueur dans toutes les institutions d’enseignement supérieur qui interdit le port du niqab dans l’enceinte universitaire et particulièrement pendant les cours, les séances d’examens et d’encadrement pour des raisons pédagogiques. Ils essayent d’y imposer leur loi par la force en terrorisant leurs camarades, en tentant de séquestrer le doyen, en l’empêchant d’accéder à son bureau, en recourant à la violence physique et verbale contre les enseignants, contre le personnel administratif et ouvrier et en menaçant de mort certains enseignants et leur doyen. Des agissements semblables, quoique n’ayant pas la même gravité et n’ayant pas bénéficié de la même médiatisation, ont été enregistrés dans d’autres établissements plongeant dans l’inquiétude les enseignants, les étudiants et leurs syndicats. Visant spécialement la FLAHM dans un harcèlement continu et sans précédent dans l’histoire de l’université tunisienne, ce groupuscule a réussi à y interrompre les cours à plusieurs reprises et a pu parfois empêcher quelques groupes d’étudiants de passer leurs devoirs surveillés. Le bureau du doyen a été saccagé et son intégrité physique a été menacée puisqu’ un volumineux morceau de béton lancé dans son bureau aurait pu l’atteindre… Continuellement harcelés, les enseignants, leur conseil scientifique, leur doyen, leurs syndicats, les étudiants et l’administration ont résisté stoïquement contre ces agressions pour sauver l’année universitaire.

L’interdiction de l’accès aux salles de cours et d’examens aux étudiantes niqabées résulte de l’application d’un code vestimentaire tacite en vigueur dans les établissements scolaires et universitaires. Elle a été confirmée, à l’échelle locale, par le conseil scientifique de la FLAHM et, à l’échelle du pays, par tous les recteurs, par tous les responsables des établissements universitaires qui ont exécuté les décisions de leurs conseils scientifiques, et particulièrement par les doyens de toutes les facultés des lettres et sciences humaines, par les doyens des quatre facultés de médecine qui se sont distingués en adressant à la presse des communiqués dans ce sens. Elle a été entérinée par le Tribunal administratif. Mais le ministre de l’intérieur, ainsi que ministre de l’enseignement supérieur, au lieu de prendre la défense du corps enseignant, du doyen, au lieu de les féliciter pour leur détermination à appliquer la loi, au lieu d’aller dans le sens du tribunal administratif qui a été consulté par le ministre de l’enseignement supérieur lui-même au sujet du port du niqab, ont préféré imputer la responsabilité de « l’affaire de la FLAHM » au doyen le livrant ainsi à la vindicte des salafistes.

Le gouvernement a également utilisé les principes de l’autonomie des universités et de la non-intervention sur les campus comme prétextes pour renoncer à ses devoirs dictés par le bon sens et codifiés par le droit tunisien et les recommandations de l’UNESCO : assurer la sécurité des étudiants, des professeurs et du personnel administratif et ouvrier. Pourtant, ni à la Manouba, ni ailleurs, on ne lui demandait de réprimer des manifestations pacifiques mais de dissuader les intrus de déranger les activités académiques, de violer les lois et particulièrement l’article 116 du Code pénal en vertu duquel « quiconque exerce ou menace d'exercer des violences sur un fonctionnaire public pour le contraindre à faire ou à ne pas faire un acte relevant de ses fonctions » commet un délit sanctionné par une peine qui peut aller jusqu’à trois ans d’emprisonnement.. Cette connivence des autorités a accru les violences salafistes qui ont atteint leur point culminant lors de la journée du 7 mars où l’on a vu la profanation du drapeau national et pendant laquelle les violences se sont soldées par un bilan de cinq blessés parmi les étudiants,

Encouragés par le laxisme du ministre de l’intérieur et de celui de l’enseignement supérieur et libres de déployer toute leur violence, ces salafistes pourraient aller encore plus loin et il n’est pas exclu que l’université compte des victimes à la FLAHM et ailleurs. Les doyens des facultés des lettres n’ont d’ailleurs pas manqué de relever dans un communiqué rendu public au début du mois de mars que le spectre de l’année blanche planait sur leurs institutions.

Le doyen de la FLAHM, dont l’institution a été choisie par les salafistes pour tester la capacité de résistance des établissements d’enseignement supérieur à la violation de leurs lois , veille depuis des mois avec le conseil scientifique, les enseignants et les syndicats de base à la préservation de l’Université, du savoir, des libertés académiques, de la dignité des étudiants et des enseignants comme de leur intégrité physique. Une hiérarchie partisane essaye aujourd’hui de donner l’illusion qu’il est isolé