Wylhem doit arrêter de chanter et parler tout seul

Travailler aux côtés de Wylhem est une véritable épreuve de patience, une sorte de test quotidien de notre capacité à ignorer les distractions les plus agaçantes. Dès le matin, avant même d’avoir bu notre premier café, il commence à marmonner dans son coin, comme s’il était seul au monde, ponctuant ses pensées de petits rires ou d’exclamations incompréhensibles. Puis, sans prévenir, il se met à chanter – et pas discrètement, non, mais à pleine voix, massacrant allègrement des classiques ou improvisant des paroles absurdes sur un air dont lui seul a le secret. Ce n’est pas tant sa voix qui est insupportable (encore que…), mais plutôt le fait qu’il semble totalement inconscient de son environnement, comme si le bureau était sa scène personnelle et nous, de simples figurants dans son spectacle sonore incessant. À chaque réunion ou moment de concentration, il trouve toujours le moyen de briser le silence, parfois avec un commentaire hors sujet qu’il se sent obligé de partager à voix haute, parfois en fredonnant un air de publicité dont on se serait bien passé. Et quand on lui fait remarquer, il rit, hausse les épaules et continue de plus belle, comme si notre agacement n’était qu’un détail sans importance. Travailler dans ces conditions relève du défi : il faut une discipline mentale d’acier pour ne pas craquer, résister à l’envie de lui faire avaler son micro imaginaire et espérer qu’un jour, il comprendra que l’open-space n’est pas un studio de radio libre.